Champions des Jeux olympiques de Séoul 1988: Patrice Gaille, André Kuhn, Zsolt Madarasz, Gérald Pfefferlé, Michel Poffet
Champions suisses 2008: Marcel Fischer, Fabian Kauter, Michaël Kauter, Valentin Marmillod, Benjamin Steffen

LES TÊTES GRISES ONT DONNÉ DU FIL À RETORDRE AUX ÉTOILES MONTANTES

gail_poff_kuhn.pngREVENANTS André Kuhn, Michel Poffet et Patrice Gaille (de gauche à droite) ont défendu avec le sourire l'honneur de l'équipe de rêve qui leur a permis de briller aux Jeux olympiques de Séoul en 1988. (SP)
Score final: 18 à 7. C'est sans appel. Les jeunes champions de l'escrime suisse n'ont pas plié devant les assauts des anciennes gloires. Mais les «vieux» ont montré samedi qu'ils avaient encore du coffre, lors du tournoi exhibition qui a marqué les festivités du 125e anniversaire de la Société d'escrime de La Chaux-de-Fonds.
Solidarité. C'est peut-être le maître-mot de l'escrime. Sollicités par les organisateurs du 125e anniversaire de la Société d'escrime de La Chaux-de-Fonds, les jeunes champions suisses ont immédiatement accepté l'idée de rencontrer en combats singuliers les anciennes gloires.
C'est ainsi que l'on a vu s'affronter, samedi après-midi au Pavillon des sports, les Gaille, Poffet, Kuhn et Pfefferle et les Steffen et autre Kauter ou Fischer.
Sur 25 matches, les jeunes en ont gagné 18. «Ils nous ont respectés», indiquait à l'issue des rencontres un Patrice Gaille encore en nage. Des deux côtés, la marque de ces affrontements fraternels a été «le plaisir partagé», estimait-il.
A voir les jolis points marqués au long des assauts, toujours applaudis par un public de connaisseurs, on n'a pu que se rendre à l'évidence: l'escrime conserve. Et, comme le vélo, ça ne s'oublie pas. Ainsi, André Kuhn, l'un des trois Chaux-de-Fonniers qui participa aux Jeux olympiques de Séoul, en 1988, l'avouait sans ambages: «J'ai utilisé le matériel que j'ai descendu du grenier.»
C'est dire si les anciens champions ont gardé l'œil, la souplesse, la vitesse et l'esprit tactique qui caractérisent ce sport. Rien de plus beau que de crucifier l'adversaire en esquivant une fougueuse attaque apparemment imparable!

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Les anciens champions chaux-de-fonniers, dont deux - Patrice Gaille et Michel Poffet - vivent et travaillent toujours ici, ne se piquent pas de nostalgie. Ils gardent cependant le vif souvenir de l'époque bénie où ils ont renversé des montagnes. Ce succès, ils le doivent avant tout à l'esprit d'équipe qui régnait alors. Gagner une reconnaissance internationale, «avec les moyens dérisoires qui étaient les nôtres, c'était vraiment exceptionnel», estime Patrice Gaille.

Pour André Kuhn, enseignant de droit pénal et de criminologie aux universités de Lausanne et de Neuchâtel, l'escrime a été une école de vie. «Elle m'a permis d'intégrer l'échec dans une dynamique de succès», explique-t-il aujourd'hui. «Au bout du compte», renchérit Michel Poffet, «nous avons perdu plus souvent que gagné!»
Ils soulignent le rôle des maîtres d'armes: «Ils m'ont appris le respect», dit Michel Poffet. Lors de l'initiation, «le jeune escrimeur doit apprendre à perdre», rappelle Patrice Gaille. Ensuite, «il doit apprendre à gagner sans se monter la tête», complète André Kuhn.
Tous sont conscients que jamais ce sport ne deviendra un sport de masse chouchou des médias. Ils ne s'en plaignent pas. «Les assauts sont très rapides, il faut vraiment s'y connaître pour capter la subtilité d'une touche», dit Patrice Gaille. Au fond, «pour comprendre ce sport, il faut l'avoir pratiqué», estime-t-il. Et le pratiquer, à les voir, ça donne la pêche pour très longtemps. L'escrime conserve, d'autant que c'est un sport imperméable au dopage: aucun produit ne peut à la fois favoriser la souplesse et la force, la concentration et l'explosivité, l'agressivité et la jugeote... /LBY
LÉO BYSAETH, L'Impartial

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